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Comment devenir une "grande dame" de la P.A.

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Avertissement :
Ce billet contient de vrais morceaux de cynisme pur sur lit de colère, si vous craignez de ne pas le digérer, dispensez-vous de sa lecture.



Imaginons que je me sente en échec social et/ou familial, isolée, limitée par des moyens financiers insuffisants, je décide de faire don de cette vie et de ce temps libre pour aider ceux que je considère comme mes meilleurs (et seuls) amis : les animaux.

Les animaux sont des compagnons parfaits : toujours contents, me rendant au centuple la moindre de mes bontés, ne se plaignant pas et n'étant de toute manière écoutés par personne s'ils se plaignent.

Dès demain, je vais me balader sur tous les sites et forums de PA en clamant que je suis prête à prendre en charge des vieux, des moches et des handicapés, je suis bien certaine qu'il ne faudra pas longtemps avant qu'on m'en refourgue jusqu'à l’asphyxie.

En l'espace de quelques mois, je me retrouve à la tête d'un beau cheptel de quelques dizaines de misérables. Évidemment, pour pouvoir les entretenir, je dois faire appel à la charité publique. Comment imaginer qu'avec mes minuscules ressources, je pourrais prendre en charge seule des animaux cabossés dont les frais vétérinaires sont himalayens ?

Pour inciter les bonnes âmes à faire des dons, je vais devoir investir du temps, beaucoup de temps, faire des photos, des vidéos, les publier sur les forums et réseaux sociaux, lancer des appels aux dons sur les sites à cagnottes, faire parler de moi et de ma
petite "cour des miracles".
Il faut que les donateurs potentiels aient l'impression de faire partie de la famille, qu'ils apprennent à connaitre ses membres pitoyables mais si attachants et leur humaine tellement généreuse qui leur sacrifie toute sa vie
.

Bien sur, entre le manque d'argent et le manque de temps, les bestioles risquent de ne pas y trouver leur compte, mais elles ont un toit sur la tête et une gamelle pleine alors que demande le peuple ?
Je néglige mes protégés, mais le système est ainsi fait que, dès qu'une ou deux asso se seront débarrassées chez moi de leurs incasables, elles me soutiendront de toutes leurs forces parce que me désavouer serait se désavouer et admettre qu'elles ont envoyé au casse-pipe les protégés dont le "sauvetage" leur avait permit de se faire mousser.

Non seulement elles devraient reconnaitre leurs tords mais elles devraient également récupérer leurs laissés-pour-compte qu'elles m'ont confiés en grande quantité.

Bref, certains choisiront de fermer les yeux sur ma surpopulation et mes négligences selon un accord tacite qui permettra à chacun de nous de briller et d'encaisser des dons tout en se disant, pour se rassurer, que ces pauvres petiots seraient morts de toute manière et que ce qu'ils ont, si médiocre que cela soit, c'est le mieux qu'ils pouvaient espérer de la vie, on ne va donc pas remuer la boue.

Dans un an, deux à tout casser, j'acquière le statut envié de "Grande Dame de la PA", je deviens intouchable et quiconque ose me remettre en question est immédiatement agressé par mes complices à coup de "Quand tu en auras sauvé autant qu'elle, tu pourras parler", "C'est une honte d'attaquer une femme qui a choisi de se sacrifier pour les plus faibles !", "Tu es qui toi pour remettre en cause une personne aussi généreuse ?" et enfin, c'est là que le piège se referme : "Tu crois vraiment que tellement d'associations et de bénévoles lui feraient confiance si elle maltraitait les animaux ?"

Voilà, je suis devenue une de ces rombières en mal de reconnaissance sociale, arrogante, haineuse, ne supportant pas la moindre remise en cause, le moindre doute, trônant du haut de mes longues années d'expérience sur un monde dont je prétend tout savoir mieux que quiconque, indéboulonnable, soutenue par tellement d'associations et de bénévoles qu'on en viendrait presque à se demander pourquoi on doute encore de mon implication, de mon abnégation.

Je joue les humbles, les sages, mais, au fond de moi, j'exulte chaque fois qu'on salue mon action.
Au fond, j'ai presque réussi à me persuader que les compliments qu'on m'adresse sont justifiés, oubliant au passage que, moi aussi je me suis contentée d'exploiter la misère animale pour ma propre satisfaction, ma propre gloire et que cette absence totale d'humilité m'exclut de cette communauté de saints et martyrs à laquelle je (c)rêve d'appartenir.
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